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du travail ; prouvez-leur que l’intérêt du riche n’est pas opposé à l’intérêt du pauvre.Je vous remercie de la manière flatteuse dont vous appréciez mes efforts pour le bien public et je porte un toast :A la prospérité de l’industrie française !A ses honorables représentansreprésentants ! »IXSens., 9 septembre 1849« Messieurs,Il y a un an, à pareille époque, j’étaisJ'ÉTAIS exiléEXILÉ, proscritPROSCRIT ; si j’eusse voulu mettre le pied sur le territoire français, on m’en eût interdit l’entrée. Aujour- d’hui je suis le chef reconnu de la grande nation. Qui a produit ce changement dans ma destinée ? C’est vous, c’est le département de l’Yonne tout entier, qui, en m’élisant représentant du peuple, m’a rappelé dans mon pays. Vous avez pensé, messieurs, que mon nom serait utile à la France ; vous vous êtes dit qu’étranger à tous les partis, je n’étais hostile à aucun, et qu’en réunissant sous le même drapeau tous les hommes dévoués à notre patrie, je pourrais servir de point de ralliement dans un moment où les partis semblaient acharnés les uns contre les autres. Le département de l’Yonne a donné l’exemple, exemple qui a été suivi, qui a été contagieux, puisque plus tard la France m’a donné six millions de suffrages. Il y a longtemps que je désirais me trouver au milieu vous. Je désirais voir de mes yeux ceux dont les suffrages sont venus les premiers me chercher sur la terre étrangères. Je ne vous remercie pas de m’avoir donné le pouvoir. Le pouvoir est un lourd fardeau. Ce dont je vous remercie, c’est de m’avoir ouvert les portes de ma patrie. Messieurs, j’aurais voulu pouvoir aller jusqu’à Tonnerre, ou j’aurais été plus au centre du département, pour lui témoigner toute ma reconnaissance ; mais le temps m’a manqué. Je le regrette vivement.Permettez-moi donc, messieurs, de porter un toast, non seulement à la ville de Sens, mais au département de l’Yonne tout entier. Croyez que je serai toujours digne de la confiance que vous m’avez témoignée d’une manière si touchante. A la ville de Sens ! auAu département de l’Yonne tout entier ! »XInstitution de la magistrature.,
3 novembre 1849
« Messieurs,Je suis heureux de me trouver aujourd'hui au milieu de vous et de présider une cérémonie solennelle qui, en reconstituant la magistrature, rétablit un principe, qu’un égarement momentané a pu seul faire méconnaître. Aux époques agitées, dans les temps où les actions du juste et de l’injuste semblent confondues, il est utile de relever le prestige des grandes institutions et de prouver que certains principes renferment en eux une force indestructible. On aime à pouvoir dire : Les lois fondamentales du pays ont été renouvelées, tous les pouvoirs de l’EtatÉtat sont passés en d’autres mains, et cependant, anau milieu de ces bouleversemensbouleversements et de ces naufrages, le principe de l’inamovibilité de la magistrature est resté debout.En effet, les sociétés ne se transforment pas au gré des ambitions humaines ; les formes changent, la chose reste. Malgré les tempêtes politiques survenues depuis 1813, nous ne vivons encore que gracegrâce aux larges institutions fondées par le consulat et l’empire ; les dynasties et les chartes ont passé, mais ce qui a survécu et ce qui nous sauve, c’est la religion, c’est l’organisation de la justice, de l’armée, de l’administration. Honorons donc ce qui est immuable, mais honorons aussi ce qu’il peut y avoir de bon dans les changemensgements introduits. Aujourd’hui, par exemple, qu’accourus de tous les points de la France vous venez devant le premier magistrat de la République prêter un serment, ce n’est pas à un homme que vous jurez fidélité, mais à la loi. Vous venez ici, en présence de Dieu et des grands pouvoirs de l’EtatÉtat, jurer de remplir religieusement un mandat dont l’accomplissement austère a toujours distingué la magistrature française. Il est consolant de songer qu’en dehors des passions politiques et des agitations de la société il existe un corps d’hommes n’ayant d’autre guide que leur conscience, d’autre passion que le bien, d’autre but que de faire régner la justice. Vous allez, messieurs, retourner dans vos départemensdépartements ; reportez-y la conviction que nous sommes sortis d’une ère de révolution, et que nous sommes entrès dans l’ère des améliorations qui préviennent les catastrophes. Appliquez avec fermeté, mais aussi avec l’impartialité la plus grande, les dispositions tutélaires de nos codes. Qu’il n’y ait jamais de coupables impunis, ni d’innocens persécutés. Il est temps, comme je l’ai dit naguère, que ceux qui veulent le bien se rassurent, et que ceux-là se résignent qui tentent de mettre leurs opinions et leurs passions à la place de la volonté nationale. En appliquant la justice dans la plus noble et la plus large acception de ce grand mot, vous aurez, messieurs, beaucoup fait pour la consolidation de la République, car vous aurez fortifié dans la pays le respect de la loi, ce premier devoir, cette première qualité d’un peuple libre.
XIDistribution des récompenses de l’industrie.,
11 novembre 1849
« Messieurs.En vous voyant recevoir le juste prix de ces travaux qui maintiennent la réputation industrielle de la France à la hauteur qui lui est due, je me disais : Elle n’a pas perdu le sentiment de l’honneur cette nation où une simple distinction devient pour tous les mérites une ample récompense ; elle n’est pas dégénérée cette nation, qui, malgré ses bouleversemensbouleversements, alors qu’on croyait les ateliers déserts et le travail paralysé, est venue faire luire à nos yeux, comme une consolation et un espoir, les merveilles de ses produits. Le degré de civilisation d’un pays se révèle par les progrès de l’industrie comme par ceux des sciences et des arts. L’exposition dernière doit nous rendre fiers ; elle constate à la fois l’état de nos connaissances et l’état de notre société. Plus nous avançons, plus, ainsi que l’annonçait l’empereur, les métiers deviennent des arts ; et plus le luxe lui-même devient un objet de première utilité, une condition première de notre existence. Mais ce luxe qui, par l’attrait de séduisansséduisants produits, attire le superflu du riche pour rémunérer le travail du pauvre, ne prospère que si l’agriculture, développée dans les mêmes proportions, augmente les richesses premières du pays et multiplie les consommateurs.Aussi le soin principal d’une administration éclairée, et préoccupée surtout des intérêts généraux, est de diminuer le plus possible les charges qui pèsent sur la terre. Malgré les sophismes répandus tous les jours pour égarer le peuple, il est un principe incontestable qui en Suisse, en Amérique, en Angleterre a donné les résultats les plus avantageux : c’est d’affranchir la production et de n’imposer que la consommation. La richesse d’un pays est comme un fleuve : si l’on prend les eaux à sa source, on le tarit : si on les prend, au contraire, lorsque le fleuve a grandi, on peut en détourner une large masse sans altérer son cours. Au gouvernement appartient d’établir et de propager les bons principes d’économie politique, d’encourager, de protéger, d’honorer le travail national. Il doit être l’instigateur de tout ce qui tend a élever la condition de l’homme : mais le plus grand bienfait qu’il puisse donner, celui d’où découlent tous les autres,c’est d’établir une bonne administration qui crée la confiance et assure un lendemain. Le plus grand danger peut-être des temps modernes vient de cette fausses opinion, inculquée dans les esprits, qu’un gouvernement peut tout, et qu’il est de l’essence d’un système quelconque de répondre à toutes les exigences, de remédier à tous les maux. Les améliorations ne s’improvisent pas, ellesselles naissent de celles qui les précèdent : comme l’espèce humaine, elles ont une filiation qui nous permet de mesurer l’étendue du progrès possible et de le séparer des utopies. Ne faisons donc pas naître de vaines espérances, mais tâchons d’accomplir toutes celles qu’il est raisonnable d’accepter pour les intérêts du peuple ; réalisons, au profit de ceux qui travaillent, ce vœu philantropique d’une part meilleure dans les bénéfices et d’un avenir plus assuré. Lorsque, de retour dans vos départemensdépartements, vous serez au milieu de vos ouvriers, affermissez-les dans les bons sentimenssentiments, dans les saines maximes, et, par la pratique de cette justice qui récompense chacun selon ses œuvres, apaisez leurs souffrances, rendez leur condition meilleure. Dites-leur que le pouvoir est animé de deux passions également vives : l’amour du bien et la volonté de combattre l’erreur et le mensonge. Pendant que vous ferez ainsi votre devoir de citovenscitoyens, moi, n’en doutez pas, je ferai mon devoir de premier magistrat de la République. Impassible devant les calomnies comme devant les séductions, sans faiblesse comme sans jactance, je veillerai a vos intérêts qui sont les miens, je maintiendrai mes droits qui sont les vôtres. »
XIIOuverture de la session du conseil général de l’agriculture, du commerce
et des manufactures., 7 avril 1850
« Messieurs,Jamais le concours de toutes les intelligences n’a été plus nécessaire que dans les circonstances actuelles. Il y a quatre ans, époque de votre dernière réunion, vous jouissiez d’une sécurité complète qui vous donnait le temps d’étudier à loisir les améliorations destinées à faciliter le jeu régulier des institutions. Aujourd’hui, la tâche est plus difficile : un bouleversement imprévu a fait remblertrembler le sol sous vos pas ; tout a été remis en question. Il faut, d’un côté, raffermir les choses ébranlées, de l’autre, adopter avec résolution les mesures propres à venir en aide aux intérêts en souffrance. Le meilleur moyen de réduire à l’impuissance ce qui est dangereux et faux, c’est d’accepter ce qui est vraiment bon et utile. La position embarrassée de l’agriculture appelle avant tout les conseils de votre expérience. Déjà le gouvernement lui a porté les premiers secours par le dégrèvement de 27 millions sur la propriété foncière, annoncé à l’Assemblée législative, et sur la présentation du projet de loi sur la réforme hypothécaire. De plus, pour faciliter les emprunts, il a renoncé à une partie du droit d’enregistrement des créances hypothécaires, et bientôt il vous consultera sur un projet de crédit foncier qui offrira, je l’espère, de réels avantages à la propriété, et n’exposera pas néanmoins le pays aux dangers du papier-monnaie. On attend avec impatience votre avis au sujet du dégrèvement successif de l’impôt du sucre. Sans nuire à l’industrie importante du sucre indigène, ni à la production coloniale, nous voudrions, dans l’intérêt des consommateurs, diminuer le prix d’une denrée devenue de première nécessité. Bien des industries languissent ; elles ne se relèveront, comme l’agriculture lui-même sera rétabli. Le crédit, ne l’oublions pas., c’est le côté moral des intérêts matériels, c’est l’esprit qui anime le corps. Il décuple, par la confiance, la valeur de tous les produits, tandis que la défiance les réduit à néant. La France, par exemple, ne possède pas aujourd’hui trop de blé, mais le manque de foi dans l’avenir paralyse les transactions, maintient le bas prix des denrées premières, et cause à l’agriculture une perte immense hors de toute proportion avec certains remèdes indiqués. Ainsi, au lieu de se lancer dans de vaines théories, les hommes sensés doivent unir leurs efforts aux nôtres afin de relever le crédit, en donnant au gouvernement la force indispensable au maintien de l’ordre et du respect de la loi. Tout en prenant les mesures générales qui doivent concourir à la prospérité du pays, le gouvernement s’est occupé du sort des classes laborieuses. Les caisses d’épargne, les caisses de retraite, les caisses de secours mutuels, la salubrité des logemenslogements d’ouvriers, tels sont les objets sur lesquels, en attendant la décision de l’Assemblée, le gouvernement appellera votre attention. Une réunion comme la vôtre, composée d’hommes spéciaux, aussi éclairés, aussi compétenscompétents, sera fertile, j’aime à le croire, en heureux résultats. Exemple de cet esprit de parti qui paralyse aujourd’hui les meilleures intentions et prolonge le malaise, vous n’avez qu’un mobile, l’intérêt du pays. Examinez donc, avec le soin consciencieux dont vous êtes capables, les questions les plus pratiques, celles d’une application immédiate. De mon côté, ce qui sera possible, je le ferai, avec l’appui de l’Assemblée ; mais, je ne saurais trop le répéter, hâtons nous, le temps presse ; que la marche des mauvaises passions ne devance pas la nôtre. »
XIIISaint-Quentin., 9 juin 1850« Messieurs,Si j’étais toujours libre d’accomplir ma volonté, je viendrais parmi vous sans faste, sans cérémonie. Je voudrais, inconnu, me mêler à vos travaux comme à vos fêtes, pour juger mieux par moi-même et de vos désirs et de vos sentimenssentiments ; mais il semble que le sort mette sans cesse une barrière entre vous et moi, et j’ai le regret de n’avoir jamais pu être simple citoyen de mon pays. J’ai passé, vous le savez, six ans à quelques lieues de cette ville, mais des murs et des fossé me séparaient de vous ; aujourd’hui encore les devoirs d’une position officielle m’en éloignent. Aussi est-ce à peine si vous me connaissez, et sans cesse on cherche à dénaturer à vos yeux mes actes comme mes sentimenssentiments. Par bonheur, le nom que je porte vous rassure, et vous savez à quels hauts enseignemensenseignements j’ai puisé mes convictions. La mission que j’ai à remplir aujourd'hui n’est pas nouvelle ; on sait son origine et son but. Lorsqu’il y a quarante-huit ans, le premier consul vint en ces lieux inaugurer le canal de Saint-Quentin, comme aujour- d'hui je viens inaugurer le chemin de fer, il venait vous dire : « Tranquillisez-vous, les orages sont passés. Les grandes vérités de notre révolution, je les ferai triompher ; mais je réprimerai avec une égale force les erreurs nouvelles et les préjugés anciens, en ramenant la sécurité, en encourageant toutes les entreprises utiles. Je ferai naître des nouvelles industries, enrichir nos champs, améliorer le sort du peuple. » Il n'y a qu’à regarder autour de vous pour voir s’il a tenu parole. Eh bien ! encoreEncore aujourd’hui ma tâche est la même, quoique plus facile. De la révolution, il faut prendre les bons instincts et combattre hardiment les mauvais. Il faut enrichir le peuple par toutes les institutions de prévoyance et d'assistance que la raison approuve, et bien le convaincre que l’ordre est la source première de toute prospérité. Mais l’ordre, pour moi, n’est pas un mot vide de sens, que tout le monde interprète à sa façon ; pour moi, l’ordre c’est le maintien de ce qui a été librement élu et consenti par le peuple. C’est la volonté nationale triomphante de toutes les factions.Courage donc, habitans de Saint-Quentin ! contiContinuez à faire honneur à notre nation par vos produits industriels. Croyez à mes efforts et à ceux du gouvernement pour protéger vos entreprises et pour améliorer le sort des travailleurs. »Le président de la République a prononcé le discours suivant à la distribution des livrets faite aux ouvriers de Saint-Quentin : « Je suis heureux de me trouver parmi vous, et je recherche avec plaisir ces occasions qui me mettent en contact avec ce grand et généreux peuple, qui m’a élu ; car, voyez-vous, mes amis les plus sincères et les plus dévoués ne sont pas dans les palais. Ils sont sous le chaume ; ils ne sont pas sous les lambris dorés, ils sont dans les ateliers, sur les places publiques, dans les campagnes. Je sens, comme disait l’empereur, que ma fibre répond à la vôtre, et que nous avons les mêmes intérêts ainsi que les mêmes instincts. Persévérez dans cette voie honnête et laborieuse qui conduit à l’aisance, et que ces livrets que je me plais à vous offrir comme une faible marque de ma sympathie vous rappellent le trop court séjour que je fais parmi vous. » XIVLyon.,  15 et 16 août 1850M.Monsieur le président de la République a prononcé à Lyon trois discours : le premier en réponse au maire, le second au déjeuner du Jardin-d’Hiver, et le troisième au dîner donné par la chambre de commerce. Premier discours.« Que la ville de Lyon, dont vous êtes le digne interprète, reçoive l’expression sincère de ma reconnaissance pour l’accueil sympathique qu’elle m’a fait. Mais, croyez-le, je ne suis pas venu dans ces contrées où l’empereur, mon oncle, a laissé de si profondes traces, afin de recueillir seulement des ovations et passer des revues. Le but de mon voyage est, par ma présence, d’encourager les bons, de rassurer les esprits égarés, de juger par moi-même des besoins et des sentimenssentiments du pays. Cette tâche exige votre concours, et, pour que ce concours me soit complètement acquis, je dois vous dire avec franchise ce que je suis, ce que je veux. Je suis, non pas le représentant d’un parti, mais le représentant de deux grandes manifestations nationanales, qui, en en 1804 et en 1848, ont voulu sauver par l’ordre les grands principes de la Révolution française. Fier, donc, de mon origine et de mon drapeau, je leur resterai fidèle ; je serai tout entier au pays, quelque chose qu’il exige de moi, abnégation ou persévérance.Les bruits de coups d’EtatÉtat sont peut-être venus jusqu’à vous messsieursmessieurs ; mais vous n’y avez pas cru, je vous en remercie. Les surprises et les usurpations peuvent être le rêve des partis sans appui dans les nations ; mais l’élu de six millions de suffrages exécute les volontés du pays, il ne les trahit pas. Le patriotisme, je le répète, peut consister dans l’abnégation comme dans la persévérance. Devant un danger général, toute ambition personnelle doit disparaître.Dans ce cas, le patriotisme se reconnaît comme on reconnut la maternité dans un procès célèbre. Vous vous souvenez de ces deux femmes réclamant le même enfant. A quel signe reconnut-on les entrailles de la véritable mère ? Au renoncement de ses droits que lui arracha le danger d’une tête chérie. Que les partis qui aiment la Fiance n’oublient pas cette sublime leçon ! Moi-même, s’il le faut, je m’en souviendrai ; mais, d’un autre côté, si des prétentions coupables se ranimaient et menaçaient de compromettre le repos de la France, je saurais les réduire à l’impuissance en invoquant encore la souveraineté du peuple, car je ne reconnais à personne le droit de se dire son représentant plus que moi.Ces sentimenssentiments, vous devez les comprendre ; car tout ce qui est noble, généreux, sincère, trouve de l’écho parmi les Lyonnais. Votre histoire en offre d’immortels exemples. Considérez donc ma parole comme une preuve de ma confiance et de mon estime. Permettez-moi de porter un toast à la ville de Lyon. »Deuxième discours.« Messieurs, vous saviez que ne pouvais rester longtemps dans vos murs, et vous avez eu la pensée de réunir ce matin, autour de moi, le plus de représentansreprésentants possibles des divers élémenséléments qui contribuent à la prospérité lyonnaise. Je vous en remercie ; car je suis heureux de toutes les occasions de me mettre en contact avec le peuple qui m’a élu. En nous rencontrant souvent, nous pourrons réciproquement connaître nos sentimenssentiments, nos idées, et apprendre ainsi à compter les uns sur les autres. Quand on se voit, en effet, bien des voiles tombent, bien des préventions se dissipent.De loin, je pouvais croire la population lyonnaise animée de cet esprit de vertige qui enfante tant de troubles et presqu’en hostilité avec le pouvoir. Ici, je l’ai trouvé calme, laborieuse, sympathique à l’autorité que je représente. De votre côté, vous votrevous attendiez peut-être à rencontrer en moi un homme avide d'honneurs et de puissance, et vous voyez au milieu de vous un ami, un homme uniquement dévoué à sen devoir et aux grands intérêts de la patrie. » Troisième discours.« Je remercie le commerce et l’industrie de Lyon des félicitations qu’ils m’adressent, et je donne mon entière sympathie aux vœux qu’ils expriment : rétablir l’ordre et la confiance, maintenir la paix, terminer le plus promptement possible nos grandes lignes de chemins de fer, protéger notre industrie et développer l’échange de nos produits par un système commercial, progressivement libéral ; tel a été et tel sera le but constant de mes efforts. Si des résultats plus décisifs n’ont pas été obtenus, la faute, vous le savez, n’est pas à mon gouvernement ; mais espérons-le, messieurs, plus notre pays rentrera dans les voies régulières, plus sûrement sa prospérité renaîtra, car, il est bon de le répéter, les intérêts matériels ne grandissent que par la bonne direction des intérêts nationaux. C’est l’ameâme qui conduit le corps. Aussi se tromperait-il d’une manière étrange, le gouvernement qui baserait sa politique sur l’avarice, l’égoïsme et la peur ! C’est en protégeant libéralement les diverses branches de la richesse publique : c’est à l’étranger, en défendant hardiment nos alliés ; c’est en portant haut le drapeau de la France, qu’on procurera au pays agricole, commercial, industriel, le plus de bénéfices ; car ce système aura l’honneur pour base, et l’honneur est toujours le meilleur des guides. A la Veilleveille de vous faire mes adieux, laissez-moi vous rappeler les paroles célèbres de l’empereur : « Plusieurs fois… » Non… je m’arrête… il y aurait trop d’orgueil à vous dire, comme l’empereur : « Lyonnais, je vous aime ! » Mais permettez-moi de vous dire du fond de mon cœur : « Lyonnais, aimez-moi ! »XVStrasbourg., 22 août 1850« Messieurs, recevez mes remerciemens pour la franche cordialité avec laquelle vous m’accueillez parmi vous. La meilleure manière de me fêter, c’est de promettre, comme vous venez de le faire, votre appui dans la lutte engagée entre les utopies et les réformes utiles. Avant mon départ, on voulait me détourner d’un voyage en Alsace. On me répétait :Vous y serez mal venu. Cette contrée, pervertie par des émissaires étrangers, ne connaît plus ces nobles mots d’honneur et de patrie que votre nom rappelle, et qui ont fait vibrer le coeur de ses habitans pendant quarante années. Esclaves, sans s'en douter, d’hommes qui abusant de leur crédulité, les Alsaciens se refuseront à voir doredans l’élu de la nation le représentant légitime de tous les droits et de tous les intérêts ! »Et moi, je me suis dit : Il faut aller partout où il y a des illusions dangereuses à dissiper des bons citoyens à raffermir. On calomnie la vieille Alsace, cette terre des souvenirs glorieux et des sentimenssentiments patriotiques.j’y trouverai, j’en suis assez des coeurs qui comprendront ma mission et non dévoûment au pays. Quelques mois, en effet, ne feront pas d’un peuple profondément imbu des vertus solides du soldat et du laboureur un peuple ennemi de la religion, de l’ordre et de la propriété. D’ailleurs, messieurs, pourquoi aurais-je été mal reçu ? En quoi ai-je démérité de votre confiance ? Placé par le vote presque unanime de la France à la tête d'un pouvoir légalement restreint mais immense par l’influence morale de son origine, ai-je été séduit par la pensée, par les conseils d’attaquer une Constitution faite pourtant, personne ne l’ignore, en grande partie contre moi ? Non, j’ai respecté et respecterai la souveraineté du peuple, même dans ce que son expression peut avoir ou de faussé ou d’hostile.Si j’en ai agi ainsi, c’est que le titre que j’ambitionne le plus et celui d’honnête homme. Je ne connais rien au-dessus du devoir. Je suis donc heureux, Strasbourgeois, de penser qu’il y a communauté de sentimenssentiments entre vous et moi. Comme moi, vous voulez notre patrie grande, forte, respectée : comme vous, je veux l’Alsace reprenant son ancien rang, redevenant ce qu’elle a été durant tant d’années, l’une des provinces les plus renommées, choisissant les citoyens les plus dignes pour la représenter, et ayant, pour l’illustrer, les guerriers les plus vaillans.vaillantsA l’Alsace ! àÀ la ville de Strasbourg ! »XVIReims—, 28 août 1850« Messieurs, L’accueil que je reçois à Reims, au terme de mon voyage, vient confirmer ce que j’ai vu par moi-même dans toute la France, et ce dont je n’avais pas douté : notre pays ne veut que l’ordre, la religion et une sage liberté. Partout, j'ai pu m’en convaincre, le nombre des agitateurs est infiniment petit, et le nombre des bons citoyens infiniment grand. Dieu veuille qu’ils ne se divisent pas ! C’est pourquoi, en me retrouvant aujourd'hui dans cette antique cité de Reims où les rois, qui représentaient aussi les intérêts de la nation, sont venus se faire sacrer je voudrais que nous pussions y couronner, non plus un homme, mais une idée, l’idée d’union et de conciliation, dont le triomphe ramènerait le repos dans notre patrie déjà si grande par ses richesses, ses vertus et sa foi. Faire des vœux pour la prospérité publique, c’est en faire pour la ville de Reims, dont la position industrielle est d’une si haute importance. Permettez-moi de porter un toast à la ville de ReimnsReims. » XVIICaen., 4 septembre 1850« Messieurs,L’accueil si bienveillant, si sympathique, je dirai presque si enthousiaste, que je reçois à l’ouest comme à l’est de la France, me touche profondément ; mais je ne m’en enorgueillis pas, et je ne m’en attribue que la plus faible partie. Ce qu’on acclame en moi, c’est le représentant de l’ordre et d’un meilleur avenir. Quand je traverse vos populations, entouré des hommes qui méritent votre estime et votre confiance, je suis heureux d’entendre dire : Lesles mauvais jours sont passés, nous en attendons de meilleurs. Aussi, lorsque partout la prospérité semble renaître, il serait bien coupable celui qui tenterait d’en arrêter l’essor par le changement de ce qui existe aujourd’hui, quelque imparfait que ce puisse être. De même, si de jours orageux devait reparaître, et que le peuple voulut imposer un nouveau fardeau au chef du gouvernement, ce chef, a son tour, serait bien coupable de déserter cette haute mission. Mais n’anticipons pas tant sur l’avenir ; tâchons de régler les affaires du pays, accomplissons chacun notre devoir ; Dieu fera le reste. Je porte un toast à la ville de Caen. »XVIIICherbourg., 6 septembre 1850« Messieurs,Plus je parcours la France, et plus je m’aperçois qu’on attend beaucoup du gouvernement. Je ne traverse pas un département, une ville, un hameau, sans que les maires, les conseils généraux et les représentansreprésentants me demandent, ici des voies de communication, tels que canaux, chemins de fer, l’achèvement de travaux entrepris, partout enfin des mesures qui puissent remédier aux souffrances de l’agriculture, donner la vie à l'industrie et au commerce. Rien de plus naturel que la manifestation de ces vœux ; elle ne frappe pas, croyez-le bien, une oreille inattentive ; mais à mon tour je dois vous dire : ces résultats tant désirés ne s’obtiendront que si vous donnez le moyen de les accomplir, et ce moyen est tout entier dans votre concours à fortifier le pouvoir et à écarter les dangers do l’avenir. Pourquoi l’empereur, malgré les guerres, a-t-il couvert la France de ces travaux impérissables qu’on retrouve à chaque pas, et nulle part plus remarquables qu’ici ? C’est qu’indépendamment de son génie, il vint à une époque où la nation, fatiguée des révolutions, lui donna le pouvoir nécessaire pour abattre l’anarchie, réprimer les factions et faire triompher, à l’extérieur par la gloire, à l’intérieur par une impulsion vigoureuse. Les intérêts généraux du pays. S’il y a donc une ville en France qui doive être napoléonienne et conservatrice, c’est Cherbourg ; napoléonienne par reconnaissance, conservatrice par la saine appréciation de ses véritables intérêts. Qu’est-ce en effet qu’un port créé comme le vôtre par de si gigantesques efforts, sinon l’éclatant témoignage de cette unité française poursuivie à travers tant de siècles et de révolutions, unité qui fait de nous une grande nation : mais une grande nation, ne l’oublions pas, ne se maintient à la hauteur de ses destinées que lorsque les institutions elles-mêmes sont d'accord avec les exigences de sa situation politique et de ses intérêts matériels. Les habitanshabitants de la Normandie savent apprécier de semblables intérêts et m’en ont donné la preuve : c’est avec orgueil que je porte aujourd’hui un toast à la ville de Cherbourg. Je porte ce toast en présence de cette flotte qui a porté si noblement en Orient le pavillon français, et qui est prête à le porter avec gloire partout où l’honneur national l’exigerait ; en présence de ces étrangers, aujourd’hui nos hôtes, ils peuvent se convaincre que si nous voulons la paix, ce n’est pas par faiblesse, mais par cette communauté d’intérêts et par ces sentimenssentiments d’estime mutuelle qui lient entre elles les deux nations les plus civilisées. Au port de Cherbourg ! »XIXParis., Banrpictbanquet de l'HdfelHôtel-tlede-VilieVille
10 décembre 1850
« Messieurs.,Fêter l’anniversaire de mon élection à l’Hôtel-de- Ville, dans ce palais du peuple de Paris, c’est me rappeler l’origine de mon pouvoir et les devoirs que cette origine m’impose. Me dire que la France a vu depuis deux ans sa prospérité s’accroître, c’est m’adresser l’éloge qui me touche le plus. Aujourd’hui, je le reconnais avec bonheur, le calme est revenu dans les esprits ; les dangers qui existaient, il y a deux années, ont disparu, et, malgré l’incertitude des choses, on compte sur l’avenir parce qu’on sait que, si des modifications doivent avoir lieu, elles s’accompliront sans trouble. A quoi devons-nous d’avoir substitué l’ordre au désordre, l’espérance au découragement ? Ce n’est pas parce que, fils et neveu de soldat, j’ai moi-même remplacé un autre soldat ; mais parce qu’au 10 décembre, pour la première fois depuis Février, le pouvoir a surgi de l’exercice d’un droit légitime et non d’un fait révolutionnaire. J’aime à profiter de ces anniversaires, qui sont des jalons à l’aide desquels se mesure la marche des événemens pour constater les causes qui fortifient ou affaiblissent les gouvernemensgouvernements. Les grandes vérités sanctionnées par l’histoire des peuples sont toujours utiles à proclamer. Les gouvernemensgouvernements qui, après de longs troubles civils, sont parvenus à rétablir le pouvoir et la liberté, et à prévenir des bouleversemensbouleversementsnouveaux, ont, tout en domptant l’esprit révolutionnaire, puisé leur force dans le droit né de !ala révolution même. Ceux-là, au contraire, ont été impuissansimpuissants qui sont allés chercher ce droit dans la contre-révolution. Si quelque bien s’est fait, depuis deux ans, il faut donc en savoir gré a ce principe d’élection populaire qui a fait sortir du conflit des ambitions un droit réel et incontestable. Disons-le donc hautement, ce sont les grands principes, les nobles passions, telles que la loyauté et le désintéressement, qui sauvent les sociétés, et non les spéculations de la force et du hasard. GraceGrâce à l’application de cette politique, nous goûtons quelque repos, et aussi pouvons-nous cette année, mieux que par le passé, réaliser des progrès. Le conseil municipal de Paris a raison de compter sur le gouvernement pour tout ce qui pourra rendre plus prospère la situation de Paris, car Paris est le cœur de la France, et toutes les améliorations utiles qu'on y adopte contribuent puissamment au bien-être général. Acceptez donc, messieurs, avec mes remercîmensremerciements, un toast à la ville de Paris. Mettons tous nos efforts à embellir cette grande cité, à améliorer le sort de ses habitans, à les éclairer sur leurs véritables intérêts. Ouvrons des rues nouvelles, assainissons les quartiers populeux qui manquent d’air et de jour, et que la lumière bienfaisante du soleil pénètre partout dans nos murs, comme la lumière de la vérité dans nos cœurs.A la ville de Paris. »
XXDiner du président de l’Assemblée nationale., 19 décembre 1850« Monsieur le président,Je vous rends gracegrâce de m’avoir une seconde fois procuré le plaisir de fêter l’anniversaire de mon élection, au milieu des représentansreprésentants de la France et des membres du corps diplomatique. CestC'est encore une occasion solennelle de nous féliciter ensemble du repos dont jouit le pays. Mais ce repos a aussi son danger. Les périls réunissent, la sécurité divise. Le bien ne peut-il donc se produire sans porter en soi un germe de dissolution ? Rien ne serait plus digne des pouvoirs publics, que de donner l’exemple du contraire. Puisse donc notre union continuer dans le calme comme elle s’était formée pendant la tempête ! A la concorde des pouvoirs publics ! àÀ l’Assemblée nationale ! àÀ son honorable président ! »XXIDijon., lerjuin 1851« Messieurs,Je voudrais que ceux qui doutent de l’avenir m’eussent accompagné à travers les populations de l’Yonne et de la Côte-d’Or : ils se seraient rassurés en jugeant par eux-mêmes de la véritable disposition des esprits. Ils eussent vu que ni les intrigues, ni les attaques, ni les discussions passionnées des partis ne sont en harmonie avec les sentimenssentiments et l’état du pays. La France ne veut ni le retour à l'ancien régime, quelle que soit la forme qui le déguise, ni l’essai d’utopies funestes et impraticables : c’est parce que je suis l’adversaire de l’un et de l’autre qu’elle a placé sa confiance en moi. S’il n’en était pas ainsi, comment expliquer cette touchante sympathie du peuple à mon égard, qui résiste à la polémique la plus dissolvante et m’absout de ses souffrances ? Et effet, si mon gouvernement n’a pas réalisé toutes les améliorations qu’il avait en vue, il faut s’en prendre aux manœuvres des factions qui paralysent la bonne volonté des assemblées comme celle des gouvernemens le plus dévoués au bien public. C’est parce que vous l’avez compris ainsi que j’ai trouvé dans la patriotique Bourgogne un accueil qui est pour moi une approbation et un encouragement. Je profite de ce banquet comme d’une tribune pour ouvrir à mes concitoyens le fond de mon cœur. Une nouvelle phase de notre vie politique commence ; d’un bout de la France à l’autre des pétitions se signent pour demander la révision de la Constitution. J’attends avec confiance les manifestations du pays et les décisions de l’Assemblée, qui ne seront inspirées que par la seule pensée du bien public. Depuis que je suis au pouvoir, j’ai prouvé combien, en présence des graves intérêts de la société, je faisais abstraction de ce qui me touche. Les attaques les plus injustes et les plus violentes n’out pu me faire sortir de mon calme. Quels que soient les devoirs que le pays m’impose, il me trouvera décidé à suivre sa volonté, et, croyzecroyez-le bien, messieurs, la France ne périra pas dans mes mains. »XXIIPoitiers., ler  juillet 1851« Monsieur le maire,Soyez mon interprète auprès de vos concitoyens, pour les remercier de leur accueil si empressé et si cordial. Comme vous, j’envisage l’avenir du pays sans crainte, car son salut viendra toujours de la volonté du peuple librement exprimée, religieusement acceptée. Aussi, j’appelle de tous mes vœux le moment solennel où la voix puissante de la nation dominera toutes les oppositions et mettra d’accord toutes les rivalités ; car il est bien triste de voir les révolutions ébranler la société, amonceler les ruines, et cependant laisser toujours debout les mêmes passions, les mêmes exigences, les mêmes éléments de trouble. Quand on parcourt la France et que l’on voit la richesse variée de son sol, les produits merveilleux de son industrie, lorsqu’on admire ses fleuves, ses routes, ses canaux, ses chemins de fer, ses ports que baignent deux -mers, on se demande à quel degré de prospérité elle n’atteindrait pas, si une tranquillité durable permettait à ses habitans de concourir de tous leurs moyens au bien général, au lieu de se livrer à des dissentions intestines. Lorsque, sous un autre point de vue, on réfléchit à cette unité territoriale que nous ont léguée les efforts persévéranspersévérants de la royauté, à cette unité politique, judiciaire, administrative et commerciale que nous a léguée la Révolution ; quand on contemple cette population intelligente et laborieuse, animée presque tout entière de la même croyance et parlant le même langage ; ce clergé vénérable, qui enseigne la morale et la vertu ; cette magistrature intègre, qui fait respecter la justice : cette armée vaillante et disciplinée, qui ne connaît que l’honneur et que le devoir ; enfin, quand on vient à apprécier cette foule d’hommes éminenséminents, capables de guider le gouvernement, d’illustrer les assemblées aussi bien que les sciences et les arts, on recherche avec anxiété quelles sont les causes qui empêchent cette nation déjà si grande d’être plus grande encore, et l’on s’étonne qu’une société qui renferme tant d’élémenséléments de puissance et de prospérité s’expose si souvent à s’abîmer sur elle-même. Serait-il donc vrai, comme l’empereur l’a dit, que le vieux monde soit à bout et que le nouveau ne soit pas assis ? Sans savoir quel il sera, faisons notre devoir aujourd’hui en préparant des fondations solides. J’aime à vous adresser ces paroles, dans une province renommée à toutes les époques par son patriotisme. N’oublions pas que votre ville a été, sous Charles VII, le foyer d’une résistance héroïque ; qu’elle a été pendant quatorze ans, le refuge de la nationalité dans la France envahie. Espérons qu’elle sera encore une des premières à donner l’exemple du dévoûment à la civilisation et à la patrie. Je porte un toast à la ville de Poitiers. »XXIIIChâtellerault., 3 juillet 1851« Messieurs.,En remerciant M.Monsieur le maire « les paroles affectueuses qu’il m’adresse, je ne puis attribuer à moi seul les heureux résultats qu’il a bien voulu signaler. Depuis trois ans, ma conduite peut se résumer en quelques mots. Je me suis mis résolument à la tête des hommes d’ordre de tous les partis ; et j’ai trouvé en eux un concours efficace et désintéressé. S’il y a eu quelques défections, je l’ignore ; car je marche en avant sans regarder derrière moi. Pour marcher dans des temps comme les nôtres, il faut en effet avoir un mobile et un but. Mon mobile, c’est l’amour du pays : mon but, c’est de faire que la religion et la raison l’emportent sur les utopies ..., que la bonne cause ne tremble plus devant l’erreur. Ce résultat sera obtenu, si nous suivons dans toute la France l’exemple de Châtellerault, et si nous forgeons des armes non pour l’émeute et pour la guerre civile, mais pour accroître la force, la grandeur et l’indépendance de la nation. A la ville de Châtellerault ! »XXIYXXIVDiscours aux officiers des corps nouvellement
arrivés à Paris
.,
(9 novembre 1851)
« Messieurs,En recevant les officiers des divers régimensrégiments de l’armée, qui se succèdent dans la garnison de Paris, je me félicite de les voir animés de cet esprit militaire qui fit notre gloire et qui aujourd'hui fait notre sécurité. Je ne vous parlerai donc ni de vos devoirs, ni de la discipline. Vos devoirs, vous les avez toujours remplis avec honneur, soit sur la terre d’Afrique, soit sur le sol de la France ; et la discipline, vous l’avez toujours maintenue intacte à travers les épreuves les plus difficiles. J’espère que ces épreuves ne reviendront pas ; mais si la gravité des circonstances les ramenait et m’obligeait de faire appel à votre dévoûment, il ne me faillirait pas, j’en suis sûr, parce que, vous le savez, je ne vous demanderai rien qui ne soit d’accord avec mon droit reconnu par la Constitution, avec l’honneur militaire, avec les intérêts de la pairie ; parce que j’ai mis à votre tête des hommes qui ont toute ma confiance et qui méritent la vôtre, parce que si jamais le jour du danger arrivait, je ne ferais pas comme les gouvernenensvernements qui m’ont précédé, et je ne vous dirais pas : « Marchez, je vous suis », mais je vous dirais : « Je marche, suivez-moi ! »
LETTRE AÀ M.Monsieur EDGAR NEY« Elysée-National, le 18 août 1849Mon cher Ney,La République française n’a pas envoyé une armée à Rome pour y étouffer la liberté italienne, mais au contraire pour la régler, en la préservant contre ses propres excès, et pour lui donner une base solide, en remettant sur le trône pontifical le prince qui s’était placé hardiment à la tête de toutes les réformes utiles. J’apprends avec peine que les intentions bienveillantes du Saint-Père, comme notre propre action, restent stériles, en présence de passions et d’influences hostiles. On voudrait donner, comme base à la rentrée du pape, la proscription et la tyrannie. Dites de ma part au général Rostolan qu’il ne doit pas permettre qu’à l’ombre du drapeau tricolore on commette aucun acte qui puisse dénaturer le caractère de notre intervention.Je présume ainsi le rétablissement du pouvoir temporel du pape : amnistieAMNISTIE généraleGÉNÉRALE, sécularisationSÉCULARISATION deDE  l’administrationL'ADMINISTRATION, codeCODE napoléonNAPOLÉON etET gouvernementGOUVERNEMENT libéralLIBERAL. J’ai été personnellement blessé, en lisant la proclamation des trois cardinaux, du voir qu’il n’était pas même fait mention du nom de la France, ni des souffrances de nos braves soldats. Toute insulte faite à notre drapeau ou à notre uniforme me va droit au cœur, et je vous prie de faire savoir que si la France ne vend pas ses services, elle exige au moins qu’on lui sache gré de ses sacrifices et de son abnégation. Lorsque nos armées firent le tour de l’Europe, elles laissèrent partout, comme trace de leur passage, la destruction des abus de féodalité et des germes de liberté. Il ne sera pas dit qu’en 1849 une armée française ait pu agir dans un autre sens et amener d’autres résultats. Dites au général de remercier en mon nom l’armée de sa noble conduite. J’ai appris avec peine que, physiquement même, elle n’était pas traitée comme elle devait l’être. Rien ne doit être négligé pour établir convenablement nos troupes. Recevez, mon cher Ney, l’assurance de ma sincère amitié.LouisLOUIS-NapoléonNAPOLÉON BonaparteBONAPARTE »Lettre aà M.Monsieur Napoléon BonaparteElysée-National, le 10 avril 1849Mon cher cousin,On prétend qu’à ton passage à Bordeaux tu as tenu un langage propre à jeter la division parmi les personnes les mieux intentionnées. Tu aurais dit « que dominé par les chefs du mouvement réactionnaire, je ne suivais pas mes inspirations ; qu’impatient du joug, j’étais prêt à le secouer, et que, pour me venir en aide, il fallait, aux élections prochaines, envoyer à la chambre des hommes hostiles à mon gouvernenent, plutôt que des hommes du parti modéré » Une semblable imputation de ta part a le droit de m’étonner. Tu me connais assez pour savoir que je ne subirai jamais l’ascendant de qui que ce soit, et que je m’efforcerai sans cesse de gouverner dan»dans l’intérêt des masses et non dans l’intérêt d’un parti. J’honore les hommes qui, par leur rapacitécapacité et leur expérience, peuvent me donner de bons conseils. Je reçois journellement les avis les plus opposés, mais j’obéis aux seules impulsions de ma raison et de mon cœur. C’était à toi moins qu’à tout autre de blâmer en moi une politique modérée, toi qui désapprouvais mon manifeste, parce qu’il n’avait pas l’entière sanction des chefs du parti modéré. Or, ce manifeste, dont je ne me suis pas écarté , demeure l’expression consciencieuse de mes opinions. Le premier devoir était de rassurer le pays. Eh bien ! depuis quatre mois, il continue à se rassurer de plus en plus. A chaque tour sa tâche ; la sécurité d’abord , ensuite les améliorations. Les élections prochaines avanceront, je n’en doute pas, l’époque des réformes possibles, enEN affermissantAFERMISSANT  laLA républiqueRÉPUBLIQUE par l’ordre et la modération. Rapprocher tous les anciens partis, les réunir, les réconcilier, tel doit être le but de nos efforts. C’est la mission attachée au grand nom que nous portons ; elle échouerait, s’il servait à diviser et non à rallier les soutiens du gouvernement. Par tous ces motifs, je ne saurais approuver ta candidature dans une vingtaine de départemensdépartements ; car, songes y bien, à l’abri de ton nom, ou veut faire arriver à l’Assemblée des candidats hostiles au pouvoir, et décourager ses partisans dévoués, en fatiguant le peuple par des élections multiples qu’il faudra recommencer. Désormais donc, je l’espère, tu mettras tous tes loisirs, mon cher cousin, à éclairer sur mes intentions véritables les personnes en relation avec toi, et tu te garderas d’accréditer par des paroles inconsidérées les calomnies absurdes qui vont jusqu’à prétendre que de sordides intérêts dominent ma politique. Bien, répête- le très haut, rien ne troublera la sérennité de mon jugement, et n'ébranlera mes résolutions. Libre de toute contrainte morale, je marcherai dans le sentier de l'honneur, avec ma conscience pour guide ; et lorsque je quitterai le pouvoir, si l'on peut me reprocher des fautes fatalement inévitables j'aurai fait dumoins ce que je croyais sincèrement mon devoir. Reçois, mon cher cousin, l'assurance de mon amitié, LOUIS-NAPOLÉON BONAPARTE »

Transcription : Stéphanie Dord-Crouslé

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